La photographie et l’uranium entretiennent une histoire intime depuis la découverte par Henri Becquerel en 1896 de la radioactivité spontanée, détectés indirectement par le noircissement de plaques photographiques. On pourrait dire que cette découverte fondamentale dans le domaine de la physique l’est aussi dans l’histoire de la photographie en ce qu’elle détache l’image photographique de son lien exclusif à la représentation du visible en révélant, pour la première fois, ce qui ne l’est pas.
Ce point de départ irrigue la pièce présentée au LAAC dans le cadre de la Triennale.
Il s’agit d’un grand paysage réalisé sur le site d’une ancienne mine d’uranium du Morvan, dont le négatif une fois insolé a été exposé au rayonnement d’une roche uranifère (Pechblende) en reproduisant l’expérience d’Henri Becquerel.
Deux cent dix mines d’uranium ont été exploitées en France, de l’après-guerre aux années 2000. On peut lire ces anciens paysages miniers comme des contrepoints silencieux d’une histoire, à la représentation équivoque, d’une industrie énergétique au récit héroïque — le nucléaire « fleuron » de l’industrie française, mais aussi comme une histoire du temps long, à travers la géologie d’un paysage contaminant qui convoque notre rapport au « discret », à « l’infra mince », à l’invisible tout autant qu’à notre façon, nous humain de bouleverser durablement l’ordre des choses.